Ève Lomé

Journal extime

S’enfoncer dans la sénescence

S'enfoncer dans la sénescence

Deuil blanc. Un deuil permanent, un deuil à petit feu, un deuil sans mort.

La locution, apparue dans la littérature scientifique au début des années 1990, vma seulement intégrer l’édition 2026 du dictionnaire Le Petit Robert. Selon sa définition, il s’agit du « deuil éprouvé face aux manifestations de la maladie neurodégénérative d’un proche encore vivant ».

Le deuil blanc est avant tout celui d’un idéal. Un parent ou un conjoint devient peu à peu méconnaissable, et cette situation va obliger son proche à reconstruire un lien affectif en permanence. Moi, je souhaite continuer d’être son enfant, mais je m’aperçois que c’est le contraire qui se produit. C’est peut-être ça, le deuil blanc : accepter cette inversion des rôles.

On retrouve dans le deuil blanc des étapes similaires à celles du deuil véritable, comme la sidération, le déni ou la colère. Mais, contrairement au “vrai” deuil, la personne malade est encore bien là et la maladie est évolutive. Donc, lorsqu’un aidant parvient à un niveau d’acceptation, il suffit que la maladie franchisse un nouveau palier, et tout est à refaire. C’est pour cela que le deuil blanc ne se réalise jamais.

Dans certaines situations, les aidants vont avoir besoin de prendre leurs distances pour pouvoir continuer à vivre, parce que, inconsciemment, leur proche malade est porteur de mort, et il peut être vécu comme quelque chose qui va les tuer eux-mêmes.

Publié le 24 novembre 2020

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